Semaine 10

Droit au coeur pour les Glanches
On nous dit dans l'oreillette que certains films que nous proposons cette semaine sont déjà tombés lors de sessions récentes, toutes nos confuses

Q1.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Johnny Guitare (Johnny Guitar) imdb
de Nicholas Ray (1954)


Derrière l'homme impertinent et gentiment moqueur, volontiers impénétrable parfois malgré un brin de fantaisie, derrière celui qui manifeste une assurance à toute épreuve devant la violence et l'absurdité de l'existence, se cache très souvent un vrai romantique à l'âme plus écorchée qu'elle n'y paraît. Ainsi m'apparaissait notre ami Jean. Sans le connaître vraiment intimement comme ses proches, hélas, j'aime garder à mon esprit cette image énigmatique de "Pasco Meisner" dont la chaleur communicative et l'esprit malin nous avaient séduits lorsque les futurs fondateurs de DVDClassik (dont je faisais partie) commençaient à lier connaissance sur un vieux forum orange. Pasco/Jean nous suivaient de loin et nous avaient accompagnés dans cette aventure "classikienne" qui représente toujours notre quotidien pour la plupart d'entre nous. Sur le forum de DVDClassik, Jean s'exprimait rarement mais sûrement, distillant ses conseils cinéphiles affirmés dans quelques topics dédiés. Son pseudo était "Nada" et pour nombre d'entre nous il est devenu impossible d'oublier son fameux avatar animé... tiré de ce fabuleux chef-d'œuvre qu'il aimait tant : "Johnny Guitar". Le film de Nicholas Ray est une splendeur visuelle qui n'a d'égale que l'intensité des émotions qu'il véhicule. Sommet du western, "Johnny Guitar" est aussi (surtout ?) un sommet du mélodrame hollywoodien, mais un mélo vénéneux, impitoyable, baroque et enflammé comme les passions qui s'y déchaînent. Nicholas Ray, expert en âmes tourmentées, livre un portrait exalté de deux femmes que tout oppose, au-delà des hommes : Joan Crawford (qui livre ici l'une de ses meilleurs prestations) en femme rebelle et indépendante qui se fait violence pour renouer avec son ancien amant joué par le minéral Sterling Hayden, et Mercedes McCambridge en vielle chef de clan bigote et symbole du puritanisme américain dans ce qu'il a de plus détestable. Les couleurs jaillissent de l'écran comme fusent les sentiments de ces personnages amenés à leur point d'ébullition sur fond de transformation du vieil Ouest. Au-delà des magnifiques joutes verbales de ce western psychologique, la scène d'incendie du ranch restera pour toujours l'une des scènes les plus splendides et saisissantes de cette œuvre qui se hisse jusqu'aux sommets du genre avec sa poésie noire. Jean, amateur d'expériences extrêmes au cinéma, ne pouvait qu'être fasciné par ce western incandescent. Roy Neary

Pasco Meisner

Q2.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Snow Angels (Snow Angels) imdb
de David Gordon Green (2007)


David Gordon Green est un des seuls réalisateurs contemporains (avec James Gray aussi présent dans cette semaine) à trouver vraiment grâce aux yeux de Jean, il était donc impossible qu'il soit absent de cette semaine particulière. Nous avons donc choisi un film de sa carrière pré-Appatow sa plus remarquable (espérons qu'il y revienne), Snow Angels est un drame que n'aurait pas renié Atom Egoyan (la neige sans doute), chronique implacable d'un drame annoncé, porté par un Sam Rockwell habité, le film s'attache à nous décrire le quotidien de l'horreur de la séparation et de la perte d'un enfant. Sans tomber dans la pathos à aucun moment, David Gordon Green réussi à nous émouvoir, notamment grace au soin porté à l'écriture de ses personnages.

Rocka

Pasco Meisner

Q3.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Le crime farpait (Crimen ferpecto) imdb
de Álex de la Iglesia (2004)


Ce film est une des plus belles réussites d'Alex de la Iglesia, bien supérieur à son pourtant plus connu "Mes chers voisins". Là où Klapich fait "Rien du tout", de la Iglesia lui utilise l'humour noir pour dépeindre les relations des vendeurs d'un grand magasin. Comédie noire au propos acerbe, le film joue à fond la carte de l'outrance et nous emmène toujours plus loin dans le grand guignol, là où de la Iglesia n'est jamais aussi bon.
Rocka

Pasco Meisner

Q4.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Thriller - a cruel picture (Thriller - en grym film) imdb
de Bo Arne Vibenius (1974)


Jean aimait les films de vengeance, de par ce qu'il délivraient sur la nature humaine, et quel meilleur représentant qu'un de leaders d'un genre en soit le rape and revenge. Film référence pour Tarantino qui lui a procuré un statut qui l'a un peu dépassé, ce film est fondateur d'un genre qui a fait fureur dans les années 70, on peut le regarder de nos jours avec un sourire amusé, mais il n'a pas perdu grand chose de sa vigueur nihiliste. Visuellement bourré d'idées réutilisé par beaucoup dans le cinéma mondial, Thriller aura marqué de son empreinte le cinéma d'exploitation. Rocka

Pasco Meisner

Q5.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Birdcage Inn (Paran daemun) imdb
de Ki-duk Kim (1998)

Comme le souligne ed à propos de Breathless, Jean était fan de film coréens, et notamment de Kim Ki Duk cinéaste Ô combien prolifique et toujours singulier. Il avait donc décidé de nous proposer ce Birdcage Inn, encore une fois il s'attache à un destin particulier, celui de Jin-a qui se prostitue en échange du gîte et du couvert dans l'auberge titre. Cette situation déjà bancale va permettre à Kim Ki Duk de dresser ses personnages les uns contre les autres pour dépeindre les dysfonctionnements d'une société au moeurs d'un autre age. Ce n'est alors que le 3e film de KKD, mais on peut percevoir déjà toutes les thématiques qui ne cesseront de parcourir son oeuvre. Rocka

Pasco Meisner

Q6.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
La bataille d'Alger (La battaglia di Algeri) imdb
de Gillo Pontecorvo (1966)

L'ami Jean était un mordu d'histoire, de même qu'un amateur de films de guerre. De toutes formes de style d'ailleurs, pourvu que la vision de la guerre qu'il souhaitait trouver chez un cinéaste démontrât une véritable sincérité de la part de ce dernier. L'important n'était pas d'embrasser la vision politique de l'artiste mais avant tout de reconnaître la justesse de son engagement et son refus de la facilité (morale comme historique). De même que l'inventivité visuelle, même la moins attractive à l'œil, restait toujours une caractéristique essentielle pour lui. Ainsi "La Bataille d'Alger" est une œuvre qui correspondait tout à fait aux centres d'intérêt de Jean, sur un plan historique comme cinématographique. Après de longues années de censure dans notre pays, on avait pu enfin découvrir le célèbre film historique de Gillo Pontecorvo consacré à la Guerre d’Algérie de sinistre mémoire. Bien qu’étant une production italo-algérienne suite à une commande du nouvel état algérien, le film expose les points de vue des deux belligérants et ne fait aucune impasse sur la violence et la barbarie pratiquées par les deux camps. Grâce à une approche documentaire (le film est d'ailleurs tourné sur les lieux même du conflit), qui n’évite pas la dramaturgie mais sans jamais y succomber, et grâce à une étude pointilleuse de nombreux personnages emportés dans la tourmente guerrière, Pontecorvo parvient à capter l’essence même de ce conflit et du drame vécu par deux peuples qui inévitablement se déchirent après avoir longtemps été profondément liés. Pour la première fois le cinéma embrassait la question du terrorisme avec une approche visuelle qui, au-delà d'éprouver le spectateur, parvenait à retranscrire une certaine forme de réalisme dans son mode de fonctionnement comme dans ses effets dévastateurs. Dans ce film éminemment politique, Pontecorvo n'entend pas choisir facilement son camp même si sa sympathie va naturellement aux indépendantistes. Sur un plan cinématographique surtout, sa vision kaléidoscopique des nombreuses personnes concernées de près par la guerre, de même que l'énergie forcément communicative de sa mise en scène, impressionnent toujours autant aujourd'hui. Roy Neary

Pasco Meisner

Q7.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Le Dernier train du Katanga (Dark of the sun) imdb
de Jack Cardiff (1968)


Après Les oies sauvages dans la semaine précédente, voilà un autre film de mercenaires digne d'intérêt. Curry (Rod Taylor), ancien militaire devenu mercenaire, est chargé par le nouveau président du Congo de ramener les diamants d'une mine tombée aux mains des rebelles et accessoirement de sauver un groupe de ressortissants qui y travaillent, pour réussir sa mission, il est accompagné d'une poignée d'hommes armés dont son fidèle bras droit, originaire du pays, et d'un ancien nazi. Le film est de 1968, pourtant il ne rentre pas dans les standards hollywoodiens de l'époque, pas d'héroïsme ou de patriotisme de pacotille mais beaucoup de noirceur et de violence, on est donc beaucoup plus proche des scènes d'actions actuelles que de celles qui se faisaient, ceci explique peut-être son echec au box-office de l'époque. En vrac, on a le droit a des scènes de massacres et de pillages, des meutres d'enfants (par un des mercenaire en plus !) et à un violent affrontement final entre Rod Taylor et l'ancien nazi. Un duel barbare, poussé par la vengeance, qui nous montre que dans certaines situations tout le monde est capable de perdre ses valeurs et de devenir une bête sauvage. Violence, vengeance, perte de contrôle, changement de personnalité, des dualités qui intriguaient et fascinaient beaucoup Jean et c'est surement pour cela qu'il avait apprécié ce film. Le réalisateur, Jack Cardiff, soigne son oeuvre et le film reste, plus de quarante ans après, toujours aussi plaisant à regarder. L'étranger

Pasco Meisner

Q8.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Funeral parade of Roses (Bara no sôretsu) imdb
de Toshio Matsumoto (1969)

Pasco Meisner

Q9.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Breathless (Ddongpari) imdb
de Yang Ik-Joon (2009)

Jean adorait l’audace du cinéma coréen, son affection sans cesse renouvelée pour Kim Ki-Duk en témoigne. Il est donc logique qu’il se soit intéressé à ce premier long-métrage rageur et tourmenté, écrit, produit et réalisé en quelques semaines par son interprète principal, Yang Ik-Jun. A une première partie ultra-nerveuse, qui enchaîne les bastons et les coups de folie, succède une seconde partie plus apaisée dans le rythme mais au moins aussi éprouvante pour les tripes, dans le parcours intime de ces deux protagonistes principaux, une petite frappe à vif et une lycéenne revêche. La manière dont la violence se fait ici le vecteur d’un travail formel ou le révélateur des fêlures des personnages ne pouvait que plaire à Jean, toujours très sensible à ces thèmes. Il nous avait recommandé le film, nous vous le recommandons à notre tour. ed crane

Pasco Meisner

Q10.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
The Ballad of Jack & Rose (The Ballad of Jack & Rose) imdb
de Rebecca Miller (2005)

Jack vit seul avec sa fille rose sur une île au large des Etats-Unis, dans la nostalgie d'un rêve communautaire sixties aujourd'hui révolu... Sentant la maladie le ronger, Jack décide de faire venir de nouvelles personnes sur l'île, pour permettre à la jeune adolescente d'établir des contacts avec le monde extérieur ; mais celle-ci ne va pas réagir comme il l'attendait. C'est un âge délicat que décrit ce film de Rebecca Miller, compagne dans la vraie vie de Daniel Day Lewis (qui incarne Jack) : celui où l'enfant s'efface devant l'adulte, un d'âge d'éveil à la sexualité, mais aussi à la morbidité du monde. A la fois très doux dans son atmosphère ouatée de cocon illusoire mais aussi très violent dans la douleur des sentiments ou dans l'incommunicabilité des êtres, The Ballad of Jack and Rose est un film comme Jean les aimait (qui peut par exemple rappeler les premiers films de David Gordon Green) : aussi délicat que cruel, avec une esthétique forte et une conscience du monde tel qu'il est, dans sa beauté comme dans sa dureté. Un beau film, complexe et troublant. ed crane

Pasco Meisner

Q11.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Il y a longtemps que je t'aime (Il y a longtemps que je t'aime) imdb
de Philippe Claudel (2008)

Je n’aurais probablement jamais accordé la moindre attention au film de Philippe Claudel si Jean ne l’avait pas élu « film du mois » dans le sujet consacré sur DVDClassik ; un film français dramatique aux couleurs grises, avec une Kristin Scott Thomas tirant une tête de vingt km de long sur l’affiche… a priori pas ma came. Mais voilà, Jean avait en partie cette influence cinéphile sur moi, à tel point que le simple fait qu’il défende un film me donne envie de le découvrir. Le moins que l’on puisse dire est que la découverte du film, après sa disparition, m’aura troublé : d’une part grâce aux qualités du film, nimbé de mystère et protégeant au final une thématique poignante autour de l’enfance (sujet aussi cher à Jean qu’à moi), et d’autre part parce que je n’ai pas pu m’empêcher de déceler sa présence à lui partout, dans un film hanté par la mort mais qui dissimule surtout, à sa manière, l’élégance, l’érudition ou la générosité derrière une réserve apparente. C’est en particulier aux filles de Jean que j’ai pensé en voyant les nièces du personnage principal, d’adorables fillettes originaires du sud-est asiatique – et c’est bien, modestement, à toute sa famille que je pense au moment où nous lui rendons collectivement cet hommage… ed crane

Pasco Meisner

Q12.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Reviens-moi (Atonement) imdb
de Joe Wright (2007)

J’avais découvert Joe Wright à travers l’excellente surprise d’Orgueil et préjugés, dont j’ai déjà parlé lors de la semaine « premiers longs-métrages ». Mais comme beaucoup de monde, j’avais un peu méprisé Reviens-moi à sa sortie, sous le prétexte du film-hollywoodien-pompeux-à-l’eau-de-rose-formaté-pour-les-Oscars. C’est Jean, là encore, qui m’a convaincu de donner une chance au film, en disant qu’il valait mieux que cela : bien m’en a pris, car dès les premiers plans (voire les premiers sons, grâce à la partition singulière de Dario Marianelli, proposée en question), on saisit que l’essentiel est ailleurs : l’imaginaire d’un enfant, une histoire qui s’écrit et le regard porté sur les choses, qui les enjolive ou les détruit… Le cœur de Atonement ne se trouve donc pas dans l’histoire d’amour entre Cecilia (Keira Knightley) et Robbie (James McAvoy), mais réside dans le regard porté par la petite sœur de Cecilia, Briony, jeune fille rêveuse et possessive, qui commet à 13 ans une irréparable erreur d’appréciation. Atonement, comme son titre original l’indique, est donc une œuvre sur l’impossibilité du pardon - qui plus est en période de guerre - et sur la chimérique nécessité d’un retour en arrière ne pouvant s’opérer que par la puissance de l’imaginaire. La dernière partie du film (portée par l’admirable Vanessa Redgrave), non seulement indispensable dans le dispositif conçu par Ian McEwan et Christopher Hampton, vient surtout éclairer d’un jour nouveau tout le reste de l’œuvre, inviter à la rétrospection : à l’instar de Briony, le spectateur est amené à questionner son propre regard, à mettre en doute ses propres interprétations, à reconsidérer ses interprétations hâtives. Telle plan ou telle séquence (voire les deux…) pourront sembler artificielles, plaquées, irréelles ? Evidemment, car elles le sont ; l’important n’étant pas ici le réalisme mais l’accomplissement d’un travail intime et impossible de rédemption par la pensée... D’une certaine manière, le film prolonge des thématiques cruelles déjà abordées par Joe Wright dans Orgueil et préjugés de Jane Austen : la force destructrice des illusions, la manière dont ces apparences conditionnent nos actes et nos existences, encarcanés que nous sommes dans une société hiérarchisée en classes... Malgré les différences d’époque et de style entre les deux films, Wright y affirme déjà la cohérence tant thématique donc que formelle de son travail (jeux de cadrages, utilisation des miroirs, qualité de la photo, amplitude de certains plans...), et il serait injuste de trop vite habiller un tel talent, revêche et ambitieux, dans un costume impersonnel de laquais des studios. ed crane

Pasco Meisner

Q13.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Le Rebelle (The Fountainhead) imdb
de King Vidor (1949)

Sacré film que ce Rebelle, dans lequel un jeune architecte visionnaire et insoumis se heurte aux archaïsmes et aux hypocrisies de son époque. Visuellement ultra-léché, extrêmement original dans certain parti-pris formels (en particulier au niveau du cadre), porté par une interprétation possédée de Gary Cooper et Patricia Neal, le film est indéniablement à ranger parmi les réussites les plus impressionnantes de son réalisateur, King Vidor. D’ailleurs, le fait qu’un gauchiste convaincu comme Jean ait été à ce point amateur d’un film prônant l’individualisme forcené suffit à en révéler les immenses qualités ! A découvrir d’urgence, donc ! ed crane

Pasco Meisner

Q14.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
L'ultime razzia (The Killing)
de Stanley Kubrick (1956)

On peut apprécier "Le baiser du tueur" comme un beau galop d'essai, mais "L'Ultime Razzia", c'est autre chose. Modèle de construction, le second film de Stanley Kubrick témoigne d'un sens de la mise en scène éblouissant pour un réalisateur aussi jeune (28 ans). Dans la lignée du "Rashomon" d'Akira Kurosawa, le film et son réalisateur dessinent d'intelligentes arabesques autour d'un même motif, une même scène de casse vue de plusieurs points de vue. La narration, ainsi distordue et malaxée, influencera jusqu'à Quentin Tarantino et son "Reservoir Dogs". Surtout, Kubrick était l'un des cinéastes cultes de Jean, au plus haut de son panthéon personnel. Pas de FRCD sans Jean, pas de semaine Jean sans Kubrick... Xav

Pasco Meisner

Q15.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
La Porte du Paradis (Heaven's Gate) imdb
de Michael Cimino (1980)


De toutes les discussions cinéphiles que j'ai eues avec Jean, si je devais ne retenir qu'un seul sujet, ce serait incontestablement Michael Cimino, l'artiste qui nous rapprochait certainement le plus lui et moi. Notre admiration commune pour ce cinéaste, par ailleurs souvent controversé, était sans bornes. Jean aimait les mavericks, surtout ceux qui s'attaquaient de front à l'histoire de leurs pays, et Cimino en est l'un des plus singuliers. Et le mélange de cynisme et de romantisme qu'on trouve chez lui ne pouvait que susciter l'intérêt de notre regretté camarade dont je soupçonnais qu'il partageât ce même esprit. Ainsi, il n'était pas concevable de ne pas proposer pour cette semaine hommage une œuvre de Michael Cimino, et nous avons opté pour la plus belle d'entre elles. Michael Cimino, auréolé par les Oscars et un succès public considérable grâce à l’époustouflant "Voyage au bout de l’enfer", se permet toutes les audaces et, porté par sa mégalomanie, engloutit des sommes d’argent pour mener à bien son nouveau projet. Il n’est pas non plus innocent que "La Porte du Paradis" marque la fin d'une période moralement et politiquement agitée, à la fois libertaire et contestataire, qui verra l’arrivée au pouvoir en 1980 du conservateur Ronald Reagan pour restaurer une image "propre" de son pays entaché par les scandales et la guerre du Viêt-Nam. Car le film de Cimino jette un voile sombre sur l’édification de la nation américaine. Il filme la violente opposition entre les éleveurs, les immigrés et les propriétaires terriens (la célèbre Johnson County War). Le réalisateur scénariste n’épargne pas ses compatriotes et décrit un monde cruel, raciste et sanglant, dans lequel la loi n’existe qu’au profit des puissants. En portant un regard acéré sur l'histoire des Etats-Unis, Cimino aime à confronter les mythes fondateurs et la réalité historique. Sa démarche est celle d'un romantique désabusé qui aime profondément son pays tout en soulignant les éléments constitutifs de la société américaine : choc des civilisations, violence intrinsèque, conquête des territoires, individualisme au sein de la communauté. Le rêve américain prend sa source dans un véritable cauchemar et il n’est pas étonnant que son film ait fait un four au box-office. Le vent de la contestation avait tourné, et plus grand monde ne voulait se regarder dans le miroir déformant que lui tendait le cinéaste. "La Porte du Paradis" mérite pourtant de figurer parmi les plus grandes œuvres de l’histoire du cinéma américain. Michael Cimino signe une fresque sanglante et désenchantée, mais aussi un western lyrique et douloureusement romantique, et prend son temps pour donner de la consistance à ses personnages forts et complexes, de célébrer les petits moments de l’existence (cf. la magnifique scène du bal, hommage à John Ford) et de magnifier les paysages du nouveau monde que la nature cruelle des hommes va souiller. La photographie signée de l’immense Vilmos Zsigmond est exceptionnelle dans sa luminosité diffuse, sa matérialité et son intemporalité. La douce musique composée par David Mansfield participe de la nostalgie et de la violence sourde du film. Les trois personnages principaux sont interprétés par trois comédiens en état de grâce : Kris Kristofferson, Christopher Walken et Isabelle Huppert. Le reste de la distribution témoigne également de l’ambition du projet : John Hurt, Sam Waterston, Joseph Cotten, Jeff Bridges, Brad Dourif, Geoffrey Lewis, Mickey Rourke… Roy Neary

Pasco Meisner

Q16.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Macadam à deux voies (Two-Lane Blacktop) imdb
de Monte Hellman (1971)


Jean aimait les films de caisse, les poursuites de bagnoles, la tôle froissée... C'était un de ses pêchés mignons, au point de nous avoir fait découvrir l'ahurissant et indispensable (du moins, au FRCD) www.imcdb.org, immense base de données des apparitions de voitures au cinéma. "Point Limite zéro" était un de ses films cultes, aussi n'est-ce guère étonnant de retrouver dans ses propositions l'étonnant "Macadam à deux voies", road-movie radical, malaxant Antonioni, Sarafian et la contre-culture américaine du début des années 70. Radical, c'est bien le mot, surtout lorsque l'on découvre l'étonnant et fameux plan final, un des plus ahurissants de l'histoire du cinéma. Xav

Pasco Meisner

Q17.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
Little Odessa (Little Odessa)
de James Gray

Je n'ai pas revu le film depuis sa sortie, mais je le ferai, bientôt. Pour Jean, notamment, qui savait parler de James Gray, et qui en parlait même particulièrement bien. Film d'une mélancolie à faire pleurer les pierres, "Little Odessa" relève donc à plusieurs titres d'un choix évident pour les Glanches, en cette semaine si particulière... Le film arbore avec fierté tout ce qui pouvait plaire à Jean : un sens de la dramaturgie exceptionnel, inspiré des plus belles tragédie grecques, un cadrage au cordeau, des acteurs au diapason (impressionnant Edward Furlong, Tim Roth au top), et la synthèse parfaite du meilleur des cinémas européens (Gray, amateur de Godard et Chabrol devant l'Eternel) et américains. Un coup d'essai, et un coup de maître. Xav

Pasco Meisner

Q18.

  • Quel film ?
3 pt.
2 pt.
1 pt.
L'obsédé (The Collector) imdb
de William Wyler (1965)

"L'obsédé" est l'un des derniers films de William Wyler ("L'insoumise", "Les plus belles années de notre vie", "Ben Hur"..), l'un des plus étonnants aussi. Je dois àJean, et à cette semaine un peu spéciale d'avoir découvert ce film, qui m'était inconnu il y a encore quelques mois. Bonne pioche : manière de "Misery" (Stephen King / Rob Reiner) avant l'heure, "L'Obsédé" dégage une ambiance tendue, digne des meilleurs thrillers. C'est dû à la mise en scène de Wyler, bon pied bon oeil à 63 ans. Mais c'est aussi dû au duo Terence Stamp / Samantah Eggar, éblouissants dans ce huis-clos étouffant. Xav

Pasco Meisner

Q19.

  • Quel film ?
3 pt.
*
* Pas d'indices pour cette question, preuves à fournir
Film mystère

Pasco Meisner