Quelques années après The Office, qui leur a offert une reconnaissance internationale (le remake US avec Steve Carrel en est à sa septième saison), les géniaux Ricky Gervais et Stephen Merchant remettent le couvert avec une série encore plus noire et grinçante que leur fameux mocumentaire. "Extras", c'est la gêne et l'embarras puissance mille, le tout magnifié par un sens de l'écriture, de l'auto-dérision et du rythme qui n'a aucun équivalent aujourd'hui dans le PAM (paysage audiovisuel mondial). On ressort de certains épisodes lessivés, tant le rire et la honte nous ont chahutés. Extras, c'est aussi un casting de guests proprement ahurissant : Ben Stiller (dans un épisode pilote mythique), Kate Winslet (vous ne la verrez plus jamais de la même manière), Daniel Radcliffe (alors lui, je ne vous en parle même pas), Diana Rigg (capture 1), David Bowie, Robert de Niro, Chris Martin etc etc. Et enfin, c'est un regard cruel et acide sur le milieu du cinéma, un regard que seule la télé pouvait poser avec autant d'acuité. A découvrir d'urgence !
Pour moi cette série est l'égale des grands séries US qui ont marqué le renouveau du genre dans les années 90 (Urgences, Friends, NYPD, X Files), HBO permet à Tom Fontana de nous livrer une série d'une noirceur rarement égalée. Dés le pilote on sait ou l'on met les pieds, Oz sera violente et fera mal. Tout au long des six saisons, Fontana maintient son credo, et réalise un véritable tour de force en nous laissant constamment entre les murs du quartier de haute sécurité. A travers les yeux du candide Tobias Beecher ,qui sera très vite mis au plis et marqué du fer rouge (Question, comment oublier cette phrase : Your Ass belongs to me now) par l’infâme Shillinger (indice 1) , on ressent toute la violence de cet univers carcéral. Oz aura su également développé une remarquable identité formelle, notamment dans le passage obligé des séquences du narrateur bloqué sur son fauteuil roulant. (indice 2). Amateurs de séries bien écrites Oz est pour vous.
Au milieu des années 80, les plus jeunes s'en souviennent, une série de science-fiction spectaculaire a beaucoup fait parler d'elle. Renouant avec les concepts de l'invasion extraterrestre et de la résistance héroïque face aux agresseurs, elle surfait également sur les tensions inhérentes à la Guerre Froide. En prenant son temps dans l'installation de l'intrigue et en développant une galerie de personnages plus ou moins attachants (même si pour la plupart stéréotypés), la série a su mettre en place un univers cohérent peuplé de héros et de traîtres tout en réactualisant quelques sombres événements de l'histoire humaine (la peur de l'anéantissement, la collaboration, la résistance). Sur le petit comme sur le grand écran, les Américains ont toujours été doués pour générer des sentiments et des réflexes communautaires visant à défendre un espace commun et des valeurs universelles. Dans "V", ces derniers sont menacés par des aliens (que l'on découvrira vite repoussants) venus d'abord en paix avant de révéler leur terrible dessein visant à transformer la Terre et ses occupants en un gigantesque garde-manger. Avant Roland Emmerich et ses âneries pyrotechniques, il y avait donc eu le vétéran de la télé Kenneth Johnson qui sut parfaitement tirer parti d'un scénario intelligent et souvent prenant. Et si les effets spéciaux ont fatalement pris un coup de vieux, cette mini-série se regarde encore aujourd'hui avec un certain plaisir. En revanche, il vaut mieux éviter la série qui en découla et qui n'alla pas au terme de sa première saison.
Pour cette semaine spéciale "séries tv", je n'ai pas voulu mettre en avant des coups de coeur récents, mais des séries plus anciennes, liées à des périodes particulières de ma vie et que je revois aujourd'hui avec probablement un petit soupçon de nostalgie, en tout cas sans aucune objectivité critique. C'est particulièrement le cas de Black Adder, que je peux assurément défendre comme la série "la plus drôle du monde". C'est en tout cas d'assez loin ce que Richard Curtis aura fait de mieux, et peut-être même aussi le fabuleux Rowan Atkinson (quoique son "Boston one-man-show" soit phénoménal) : oubliez Mister Bean, car Black Adder propose surtout un comique de dialogues, et la vivacité de l'écriture autant que la caractérisation redoutable des personnages (dont l'ineffable crétin Baldrick, image 2) en font une série redoutablement efficace. Sur 4 saisons étalées sur 4 époques historiques différentes (le XVème de Richard III, le XVIème d'Elisabeth Ier, le XVIIIème de George III, et pendant la première guerre mondiale), la série raconte depuis leur malédiction originelle (Image 3) les mésaventures de la lignée des Black Adder, tous plus vils et fourbes les uns que les autres. A noter que dans le costume de la vache (Image 1), c'était Hugh Laurie, futur Doctor House. Comment ça, vous ne l'avez pas reconnu ?
Il n'y a pas que les sitcoms américaines dans la vie ! Si l'on veut tâter d'une autre forme d'humour (plus frappadingue), c'est souvent vers la télévision anglaise qu'il faut se tourner. On ne vous fera pas injure de vous faire découvrir les fabuleux Monty Python et leur humour tant absurde que subversif, en revanche il est une série moins connue née de l'imagination fertile d'un certain John Cleese et de son épouse. "Fawlty Towers" raconte la vie quotidienne d'un petit hôtel anglais a priori sans histoires, mais gérée par un couple d'énergumènes formé par un mari et une femme qui se détestent cordialement. Le mari est joué par John Cleese et il cumule à peu près tous les défauts de la Terre ! Mais comme ce personnage délirant atteint des sommets de ridicule et qu'il a le don d'enchaîner les catastrophes, c'est avec un bonheur sans fin qu'on se repaît des ses tribulations. "Fawlty Towers" bénéficie donc de la puissance comique d'un John Cleese en grande forme, et il serait dommage de ne pas faire l'effort de découvrir cette petite pépite d'humour anglais, d'autant que le casting est à l'unisson (à l'exemple du serveur espagnol non anglophone qui accumule les gaffes.). Hilarious indeed !
Sans doute l'écueil de la semaine, injustement méconnue (même des fans des séries britanniques) cette série passée en son temps sur Canal + mérite amplement le bien que l'on peut dire d'elle. Témoignant du même ton réaliste et cru que la plupart des séries anglaises de qualité, Ghost Squad n'élude aucun des sujets polémiques qui peuvent hanter l'actualité des faits divers (que nos chaines de télé en prennent de la graine). Unité à l'existence mystérieuse, la Ghost Squad enquète sur la corruption qui gangrène la police anglaise. Elaine Cassidy (Indice 2) joue la détective Amy Harris élèment infiltré, qui à travers ses enquêtes sur les meurtres (Question, et non ce n'est pas lily rush cette tignasse blonde) et les guerres de gangs (indice 1), flirte dangeureusement avec les limites de l'éthique pour mettre fin à certaines pratiques. Ne durant malheureusement qu'une seule saison de 8 épisodes, cette série est un petit bijou d'écriture dramatique, et bénéficie d'une sympathique édition dvd chez Koba, alors n'hésitez pas.
Le détective de Baker Street aura été l'un des personnages fictionnels les plus essorés par l'industrie audiovisuelle, depuis les débuts du muet jusqu'à Guy Ritchie... De part en part, le canon holmésien aura beaucoup été trahi (pour le meilleur - cf Billy Wilder - comme pour le pire), imposant dans l'imaginaire populaire, notamment via l'intermédiaire des films avec Basil Rathbone, une vision archétypale et faussée du personnage. La première qualité de cette série britannique repose peut-être donc dans sa fidélité à la vision de Conan Doyle, dans la relative épure des intrigues comme dans la conception même du personnage. Car, surtout, la principale réussite se trouve dans le miracle que représente son interprète principal, Jeremy Brett dans le rôle d'une vie : malicieux à souhait, il incarne le flegme britannique autant que l'hyperactivité cérébrale du personnage, tout en préservant sa part de mystère et d'imprévisibilité. Par ailleurs, son Sherlock n'est pas un cocaïnomane autiste, c'est un gaillard vigoureux capable de se battre, et qui prend un malin plaisir à courir le pavés déguisé en cockney (Image 1, oui oui c'est lui le rouquin demeuré qui tient la bague). Toutes les images (et le son de l'inoubliable générique de début) étaient issues du pilote, dans lequel on comprend la légendaire défiance de Sherlock vis-à-vis des femmes, vouées à jamais à souffrir de la comparaison avec l'inimitable Irene Adler (la mariée de l'image 1). Adolescent, la série, que je suivais avec une assiduité indéfectible, m'avait aussi traumatisé pour le célèbre combat contre Moriarty aux chutes de Reichenbach... mais c'est une autre histoire !
24, c'est l'adaptation télévisuelle d'un Die Hard, rien que ça. Personnellement, je ne pensais pas qu'il était possible de tenir un tel rythme sur 24 épisodes... et sur 8 saisons ! Le principe est simple, l'action d'une saison se passe pendant une seule journée, un épisode est égal à une heure. Pourtant chaque épisode ne dure pas plus de 45/50 minutes mais les scénaristes ont eu la bonne idée de prendre en compte les coupures publicités en incluant leur temps dans le décompte de l'heure, pas mal, non ? 24 Heure Chrono est donc un "ride" d'action, de suspens et de retournement de situation en tout genre qui sont tous plus énormes les uns que les autres et pourtant, ça fonctionne, tout simplement parce qu'on a pas le temps de se poser de questions sur le "pourquoi du comment" et surtout parce que c'est un plaisir jubilatoire de voir cette débauche de sensations fortes sur un petit écran chaque semaine. Et puis il y a le personnage principal, Jack Bauer, un agent spécial qui traque les terroristes qui veulent faire tomber les Etats-Unis dans le chaos ! Un homme maudit ce Jack, puisque tous ceux qu'il cotoie sont amené à se faire descendre ou à le trahir, mais par contre il ne vaut mieux pas être sur sa route quand il est en "mission" -le terme prend tout son sens dans cette saga- puisqu'il est plutôt doué dans son job et il est vraiment prêt à tout pour arriver à ses fins - aaah la fameuse balle dans le genoux du terroriste en indice. Bref, je suis d'accord pour dire que toutes les saisons ne sont pas réussies, mais bon, une fois qu'on est lancé dans une saison, difficile de s'arrêter et puis qui va remplacer notre dose d'adrénaline cathodique maintenant que Jack à pris sa retraite ?
Les Américains ont toujours éprouvé une véritable fascination pour les serial killers, et il semble que depuis une vingtaine d'années le monde entier ait été peu à peu contaminé. Le cinéma en particulier a longtemps été le vecteur le plus fort de cet intérêt morbide pour ce type particulier de grand criminel, et le sujet a pu connaître de nombreux développements tant cette figure du mal se prête parfaitement à l'exploration de nos pulsions et de nos penchants les plus mystérieux et dérangeants. Comment devient-on serial killer ? Qui sont-ils ? Où se cachent-ils ? Et comment la société s'arrange-t-elle pour vivre avec ces monstres ? En 2006, la thématique du tueur en série fait l'objet d'une nouvelle approche sur le petit écran. C'est la formidable vitalité de la série américaine et sa capacité à innover qui permet l'éclosion d'un personnage extraordinaire, d'un antihéros jamais vu jusqu'alors. En faisant de Dexter Morgan, serial killer travaillant au sein de la police de Miami comme expert en médecine légale, le héros de sa série, James Manos Jr. assène un uppercut aux téléspectateurs. Car Dexter est un jeune homme sympathique (interprété par le formidable Michael C. Hall), même si dénué de tout sentiment. Et son chemin est celui d'un être traumatisé par un passé douloureux et enfoui, d'un homme en quête d'une humanité même si elle n'est souvent que de façade. Et surtout Dexter conditionne le point de vue de la série (par son parcours personnel qui détermine le récit, par sa voix off), ainsi le spectateur s'identifie naturellement à ce tueur et tremble pour lui tout en étant estomaqué par ses actes ! "Dexter" renvoie à nos inhibitions, à la nature fondamentalement prédatrice de l'être humain que la société essaie tant bien que mal de maîtriser. Avec intelligence, malice, humour et un sentiment continu de torpeur dû à de régulières ruptures de ton, ce petit bijou de la télé US se regarde avec une réelle fascination, d'autant que sur un plan visuel "Dexter" est une splendeur.
Ils sont balèzes les scénaristes de The Shield, parce que c'est pas donné à tout le monde d'arriver à nous faire aimer un flic aussi ripoux que ce Vic McKey, tellement pourri qu'il va jusqu'à assassiner un collègue infiltré dans son équipe qui cherchait à le faire tomber ! C'est clair qu'il ne fait rien pour qu'on s'attache à lui dans le premier épisode, mais petit à petit, à force de suivre son quotidien de "super-flic" on fini par s'habituer à sa vision du monde, parce que le milieu où lui et son équipe évoluent et souvent bien pire qu'eux, drogues, viols, meutres, corruptions voilà leurs quotidiens. Le plus gros avantage des séries c'est que les personnages ont le temps d'exister, de s'épaissir, du coup, le meurtre de ce flic infitré passe au second plan et enfin à force de suivre toutes les intrigues de la "Strike Team" et de tous les personnages secondaires qui les entourent -Julien, Shane, Lem, Claudette, Wagenbach, Aceveda, etc...- on le met dans un coin et puis on n'y pense plus. Mais plus McKey et ses hommes avancent dans le temps en s'enfoncant dans l'illégalité et la corruption -la théorie des dominos, vous connaissez ?- plus le fantôme de ce crime refait surface, jusqu'à ce qu'il obtienne sa vengeance. Car oui, la série qui dure 7 saison à bien une fin, efficace, implacable, logique... une fin si aboutie qu'elle vous hantera longtemps après le générique final. Grandiose.
La meilleure série au monde ? En cinq saisons top niveau (avec certes un léger essoufflement sur la toute fin), David Simon signe un portrait époustouflant de l'Amérique de George Bush, passant en revue, sans avoir l'air d'y toucher, la drogue, l'éducation, la presse, la politique, le syndicalisme... Le tout servi par une écriture exceptionnelle, un casting incroyable (les séries américaines semblent être un inépuisable vivier de découvertes majeures), et un sens du récit policier unique en son genre. Une oeuvre majeure, saluée par la critique et Obama himself qui a toujours affirmé voir dans The Wire / Sur écoute la plus belle série américaine de tous les temps.
Clear Eyes, Full Hearts Can't Lose !